Pourquoi recourir au BEFA (bail en l’état de futur d’achèvement) ?

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Pourquoi recourir au BEFA (bail en l’état de futur d’achèvement) ?

Avantages et risques du BEFA dans les projets d’immobilier commercial et tertiaire.

Le BEFA (bail en l’état futur d’achèvement) offre une solution contractuelle adaptée aux besoins spécifiques des parties impliquées dans un projet immobilier commercial ou tertiaire.

Toutefois, il requiert une rédaction minutieuse des contrats et une anticipation des différents scénarios possibles pour protéger les intérêts de toutes les parties et minimiser les risques de mise en jeu de la responsabilité du bailleur.

1. Intérêts du BEFA

a) Avantages pour le bailleur investisseur

Le BEFA permet de sécuriser le financement d’un projet immobilier de construction ou de rénovation lourde en garantissant une occupation et donc de sécuriser des revenus locatifs avant l’achèvement du bâtiment.  

Ceci permet au bailleur de garantir une partie du retour sur investissement dès le début du projet.

La sécurisation du bail en amont permet aussi de vérifier que le projet répond à un besoin réel du marché.

Ce point est primordial dans les projets immobiliers innovants. Par exemple, les « food hall » ou « food courts » sont un concept relativement nouveau en France. Le BEFA permet de valider la pertinence de telles propositions commerciales sur un territoire donné avant de débuter le projet.

Cette validation de concept par le marché fonctionne également pour les projets plus classiques pour lesquels la configuration commerciale doit être renouvelée afin d’être en adéquation avec la demande locale.

Vis-à-vis des banques et des investisseurs, la prise à bail des espaces via des BEFA rend le projet plus attractif car le risque de voir les locaux vacants est éliminé en totalité ou en partie, facilitant ainsi l’obtention de financements.

b) Avantages pour le preneur

  •  Personnalisation des espaces  

Comme le preneur s’engage dès la phase de construction, il est souvent possible d’adapter et de personnaliser les espaces selon ses besoins spécifiques, ce qui constitue pour le promoteur un argument de vente important.

Les besoins spécifiques d’un commerce permettent au promoteur d’offrir des prestations semblables dans d’autres locaux, ou bien de créer une différenciation, et attirer ainsi différents types d’entreprises.

  • Conformité RSE et performance énergétique

Louer un bien en état futur d’achèvement garantit d’accéder à des locaux neufs, dotés des dernières normes en matière de performance énergétique, de sécurité et de confort, ce qui peut se traduire par des économies d’énergie et une meilleure qualité de vie au travail.

Ces points sont importants pour le bilan extra-financier de certains preneurs qui doivent rendre compte de l’impact de leur opérations (pour plus d’informations sur ce point, voir notre article intitulé « CSRD : les nouvelles obligations des entreprises »). 

  • Flexibilité et anticipation

Le BEFA permet aux entreprises de planifier leur expansion en anticipant leurs besoins futurs en termes d’espace, sans avoir à attendre l’achèvement des travaux pour se positionner. Ce point est important pour les entreprises en croissance comme pour les franchiseurs qui ont besoin d’assurer une présence significative dans le territoire.

Le bail en l’état futur d’achèvement offre donc une solution pour les bailleurs et les preneurs, permettant de répondre de manière optimale aux besoins spécifiques des entreprises tout en contribuant à la réalisation de projets immobiliers ambitieux ou innovants.

2. Les risques d’une trop grande implication du preneur

La conclusion d’un BEFA exige une grande précision dans la détermination des responsabilités de chaque partie impliquée.

Ce type de bail se distingue en effet par le rôle proactif que peut jouer le preneur, qui ne se limite pas à une simple occupation des locaux à leur achèvement, mais s’étend à une participation active dès les premières phases du projet immobilier.

a) Rôle actif du preneur

Dans le cadre d’un BEFA, le preneur n’est pas un acteur passif qui se contente d’attendre que l’immeuble soit terminé pour occuper les locaux.

Il peut d’ailleurs être lui-même l’initiateur du projet immobilier, influençant ainsi directement la conception et la réalisation de l’immeuble.

Cette implication peut aller de la sélection du terrain à la définition des spécifications techniques de l’ouvrage, en passant par le choix des matériaux et des équipements.

Cette démarche permet au preneur de s’assurer que le bien immobilier répondra parfaitement à ses besoins spécifiques, qu’il s’agisse d’exigences fonctionnelles, esthétiques ou environnementales.

b) Précautions juridiques

L’implication active du preneur n’est pas sans conséquences sur ses responsabilités futures.

Le Code civil, notamment les articles 1984 et suivants relatifs au mandat, ainsi que les articles 1792 et suivants concernant la responsabilité du constructeur, encadrent strictement les rôles et responsabilités de chaque partie dans un projet de construction.

Si le preneur outrepasse son rôle de preneur-locataire pour endosser des fonctions normalement dévolues au maître d’ouvrage ou au constructeur, il pourrait se voir requalifié en contractant général, ce qui entraine une augmentation significative de sa responsabilité, notamment en matière de garantie décennale et de garantie de parfait achèvement, le rendant potentiellement responsable à l’égard de tiers des vices de construction ou des défauts de conformité de l’immeuble.

Pour éviter une telle situation, il revient à l’avocat de préciser le rôle et les responsabilité de chacun, en veillant à ce que le contrat maintienne le preneur dans son rôle de locataire, sans lui conférer de responsabilités qui relèveraient normalement du maître d’ouvrage ou du constructeur.

Le contrat doit donc préciser la nature et l’étendue de l’implication du preneur dans le projet, en définissant les limites de ses interventions pour éviter toute ambiguïté susceptible de conduire à une requalification juridique de ses actions.

c) Critères de requalification

Le preneur peut être requalifié en maître d’ouvrage s’il s’implique trop dans la construction elle-même. 

Toutefois, présenter des besoins ou des exigences n’est pas synonyme de construire. Les usages du métier font qu’une certaine souplesse a été reconnue avec le temps, pour que le droit ne devienne pas un frein à l’activité économique.

On pourra citer par exemple : 

  • La preuve d’une influence déterminante : L’intervention du preneur dans la planification du projet, même avec la possibilité de modifier des aspects de la construction, ne constitue pas toujours une influence déterminante suffisante pour requalifier le contrat.
  • Les pratiques du secteur : Il est courant pour un locataire professionnel, y compris les entités publiques, de prendre des mesures pour s’assurer que l’emménagement puisse se faire dans les délais prévus et pour que l’activité puisse y être exercée normalement selon des besoins spécifiques. 

Ces actions, y compris l’implication dans la planification ou le suivi de l’exécution sont désormais considérées comme un usage dans ce type de contrat et ne mènent pas forcément à une requalification.

L’analyse du droit et de la jurisprudence, et de leurs évolutions, permettront de sécuriser le contrat en vue d’éviter une requalification inattendue.

3. Clauses essentielles des BEFA

Lors de la négociation d’un BEFA, plusieurs clauses doivent être définies pour protéger les intérêts du bailleur et du preneur.   

a) Définition du programme

Cette clause décrit précisément l’immeuble à construire, y compris ses caractéristiques techniques, ses équipements, et ses performances énergétiques. Elle doit être détaillée pour éviter tout malentendu sur ce que le bailleur s’engage à livrer.

b) Travaux modificatifs (TM) et travaux supplémentaires  (TS)

  • Travaux modificatifs (TM) : Ils concernent les modifications demandées par le preneur par rapport au projet initial. Cette clause doit bien préciser qui est responsable de la conception, de la réalisation, et du financement de ces travaux, ainsi que leur impact éventuel sur le calendrier de livraison.
  • Travaux supplémentaires (TS) : Ce sont des travaux supplémentaires demandés par le preneur, qui ne sont pas inclus dans le projet initial et qui ne sont pas des modifications, mais de véritables ajouts. La clause doit définir les modalités de réalisation de ces travaux, leur financement, et leur impact sur le loyer.

c) Calendrier et causes légitimes de retard

Le calendrier de réalisation du projet doit être clairement établi, avec des étapes clés et des dates précises. Il faut aussi définir les causes légitimes de retard qui pourraient justifier un décalage dans la livraison, telles que des conditions météorologiques défavorables, des retards dans l’obtention de permis, ou des modifications importantes du projet à la demande du locataire.

d) Garanties de prise de possession

Cette clause offre des assurances au locataire que l’immeuble sera livré dans les conditions convenues et dans les délais prévus. Elle peut inclure des pénalités de retard, des garanties financières spécifiques, ou des options pour le preneur en cas de non-respect des engagements du bailleur.

e) Clause de garantie ou cautionnement solidaire

Le preneur est plutôt bien protégé, mais le bailleur investisseur doit l’être aussi car son investissement est significatif. Il prend les risques de l’opération.

Cette clause exige donc du preneur qu’il fournisse une garantie bancaire ou un cautionnement par un tiers solvable qui s’engage à couvrir les obligations financières du preneur en cas de défaillance de ce dernier.

En conclusion

Le BEFA offre des garanties aux investisseurs et une opportunité unique pour le preneur d’orienter le projet immobilier selon ses besoins. Il faudra se souvenir que cette flexibilité doit être exercée dans un périmètre bien défini si le preneur ne veut pas être responsable comme le maitre d’ouvrage.

Une rédaction contractuelle précise et une répartition claire des rôles sont essentielles pour sécuriser les intérêts de chaque partie et garantir le succès du projet immobilier.

 

Références

Article 1984 Code civil (mandat)

Article 1792 Code civil (responsabilité du constructeur)

Article 1163 Code Civil (contrat sur chose future)

CJUE, 22 avril 2021 sur les motifs de requalification

 

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