Capital transmission et rôle de l’avocat

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Capital transmission et rôle de l’avocat

Le capital transmission est un sous-groupe du capital-investissement ou private equity, et désigne différentes méthodes de transfert de la valeur d’une société à de nouveaux investisseurs.

1. Contexte du capital transmission

En pratique, un groupe d’investisseurs – souvent issu d’un fonds de private equity – achète une part majoritaire ou la totalité des actions d’une entreprise.

Cette opération est financée par la dette, c’est-à-dire un emprunt, afin de profiter de l’effet de levier bien connu en finances d’entreprise : une grande partie du prix d’achat est donc financée par des emprunts, dont le remboursement est prévu à partir des flux de trésorerie futurs de l’entreprise acquise.

C’est la notion de LBO (leveraged buyout). 

Le capital transmission désigne donc principalement les LBO et ses variantes.

Le capital-transmission est plutôt utilisé dans des situations où une entreprise a besoin de se restructurer, de se développer ou de changer de direction stratégique.

Il est également courant dans les cas de transmission d’entreprise, quand la direction actuelle ou les propriétaires souhaitent se retirer au profit de nouveaux investisseurs ou d’héritiers.

L’objectif principal est de créer de la valeur en améliorant les performances de l’entreprise et en la revendant éventuellement à un prix plus élevé, générant ainsi un retour sur investissement pour les investisseurs.

2. Le LBO

Le LBO est la forme première de capital transmission. 

Le LBO se distingue par le recours à la dette et l’objectif de rentabilité à moyen terme : il ne s’agit pas de fusionner 2 sociétés dans une optique de synergie de leurs compétences et ressources, mais bien de revendre la cible, ou plutôt les parts dans son capital, quelques années plus tard.

Le véhicule des LBO est généralement une société holding qui détient les parts et détermine les droits de chacun.

Les pactes d’actionnaires détermineront les détails de l’opération et la gouvernance de la société.

Dans ses grandes lignes, le schéma est le suivant :

  • Sélection de la Cible : Les entreprises avec des flux de trésorerie stables et prévisibles, une position solide sur le marché et un potentiel de croissance déterminé, sont des cibles privilégiées pour les LBO.
  • Financement : Le financement d’un LBO implique généralement un mélange de dette (jusqu’à 70-90% du prix d’achat) et de capitaux propres. La dette peut prendre plusieurs formes, comme des prêts bancaires ou des financements mezzanine.
  • Acquisition et Restructuration : Après l’acquisition, des mesures de restructuration et d’optimisation sont mises en place pour améliorer la rentabilité et les flux de trésorerie de l’entreprise.
  • Sortie : L’objectif final d’un LBO est de revendre les parts dans l’entreprise après avoir augmenté sa valeur, c’est-à-dire revendre les parts à un prix supérieur au prix d’acquisition.

3. Les différentes formes de LBO

Les LBO servent à restructurer l’entreprise, à améliorer sa performance et à préparer une future revente à un prix plus élevé.

Il existe diverses façons de faire et différents objectifs dans une transmission d’entreprise, ce qui donne lieu à des variations du LBO qui dépendent de la personnalité des bénéficiaires de la transmission.

  • LBO (Leveraged Buyout) : C’est la forme la plus courante de capital-transmission, et la technique de base. Dans un LBO, les investisseurs utilisent un niveau élevé de dette (emprunts) pour financer l’achat des actions de l’entreprise. L’idée est de rembourser cette dette avec les flux de trésorerie futurs de l’entreprise.
  • LBI (Leveraged Buy-In) : désigne un LBO où les repreneurs sont externes à l’entreprise cible.
  • MBO ou LMBO (Leveraged Management Buyout) : Dans ce cas, les membres de l’équipe de gestion en place (le “management”) rachètent une part importante ou la totalité de l’entreprise, au moyen d’un emprunt auprès d’établissements financiers ou d’autres investisseurs.
  • MBI ou LMBI (Management Buy-In) : Similaire au MBO, mais dans ce cas, c’est une équipe de gestion externe qui rachète l’entreprise.
  • BIMBO (Buy-In Management Buyout) : Il s’agit d’une combinaison de MBO et MBI où une équipe de gestion externe s’associe à la direction actuelle pour acheter l’entreprise.
  • FBO (Family Buyout): c’est une technique de droit des successions qui s’inspire du LBO. Les acquéreurs sont, en principe, les héritiers ou membres de la famille de l’entrepreneur d’origine. Cette technique est utilisée dans les stratégies patrimoniales, et n’inclut pas la notion de transfert à des investisseurs secondaires.
  • OBO (Owner Buyout) : le propriétaire d’entreprise se vend à lui-même sa société pour transformer son patrimoine professionnel en liquidités personnelles. L’OBO permet au fondateur de transmettre progressivement son entreprise tout en conservant sa gestion, et offre au repreneur des facilités pour racheter les parts. Cette technique est plus adaptée aux stratégies patrimoniales mais fait quand même partie des techniques de capital transmission.
  • LBU (leveraged build-up) : Le « build-up » est une stratégie permettant de consolider ou d’optimiser une position sur un marché, par voie d’acquisition de sociétés du même secteur, c’est-à-dire une concentration, afin de profiter de synergies entre les compétences et les ressources de ce nouveau groupe de sociétés. Dans le cas du LBU, il s’agit d’obtenir des lignes de crédits disponibles  dès qu’une cible répondant à divers critères est repérée.

Dans cet article, nous nous intéresserons aux formes classiques de capital-transmission en private equity, et pas aux techniques de gestion patrimoniale  (FBO/OBO) ni aux stratégies de concentration (LBU).  

a) Le MBO (Management Buyout)

Un MBO est une forme de rachat d’entreprise où l’équipe de direction en place acquiert une part significative, voire la totalité, de l’entreprise qu’elle gère. 

Contrairement au LBO où les acheteurs sont externes, un MBO implique des acteurs internes qui connaissent déjà intimement l’entreprise.

  • Processus d’un MBO :
    • Initiation : Le processus commence lorsque les propriétaires actuels envisagent de vendre, ou lorsque les managers voient une opportunité de prendre le contrôle de l’entreprise.
    • Évaluation et Financement : Les managers, avec l’aide de conseillers financiers, évaluent la valeur de l’entreprise et structurent le financement, qui peut inclure des prêts et des investissements en capital-risque.
    • Négociation : Les managers négocient avec les propriétaires actuels pour convenir d’un prix d’achat et des termes de la vente.
    • Transition : Après l’acquisition, l’équipe de management prend le contrôle total, souvent en mettant en œuvre de nouvelles stratégies pour stimuler la croissance et la rentabilité.
 
  • Avantages du MBO:
    • Connaissance Intime de l’Entreprise : Les managers ont une compréhension approfondie de l’entreprise, ce qui peut faciliter une transition en douceur et une gestion efficace post-acquisition.
    • Motivation Accrue : l’accès à la propriété de l’entreprise donne aux managers un intérêt direct dans son succès.
 
  • Problématiques du MBO :
    • Financement externe : Le financement peut être un défi, surtout si les managers ne disposent pas de ressources personnelles suffisantes. Ils vont devoir monter un dossier conséquent pour obtenir un prêt, ce que tout le monde ne sait pas faire.
    • Conflits d’Intérêts : Des conflits peuvent survenir entre les managers et les propriétaires actuels, notamment sur la valorisation de l’entreprise.
    • Droit du travail : Un aspect souvent sous-estimé concerne les implications juridiques liées aux clauses de non-concurrence et de confidentialité des contrats de travail.

Pour un exemple de conflit d’intérêts, on peut imaginer qu’un important contrat se présente et va permettre d’augmenter drastiquement la valeur de l’entreprise. Ceci n’arrange pas les manageurs-repreneurs qui vont devoir emprunter plus.

Le conflit d’intérêt entraine un dilemme pour les cadres-investisseurs, en précisant toutefois que le droit du travail devrait entrainer les cadres à agir pour le bien de la société sans prendre en compte leur intérêt personnel. Le contraire pourrait être une faute d’inexécution de leur contrat de travail.

En ce qui concerne le droit du travail, les managers souhaitant organiser un MBO sont des cadres employés de l’entreprise, qui vont devoir prendre sur leur temps de travail pour préparer le dossier de reprise. Certaines informations de leur dossier de reprise, ou business plan, sont des informations confidentielles auxquelles ils n’ont accès qu’en raison de leur emploi.

Une modification des contrats de travail est possible mais doit recevoir l’accord de l’employeur, qui peut ne pas être d’accord, ni même ravi d’apprendre que ses cadres sont en train d’organiser son éviction. Il va falloir faire preuve de tact et de pédagogie : consulter un avocat avant de le faire permettra d’adopter le bon discours.

b) Le MBI (Management Buy-In )

Contrairement au MBO, le MBI implique une équipe de direction externe qui acquiert une entreprise et prend ensuite en charge sa gestion.

Cette approche est souvent adoptée lorsque l’entreprise n’a pas de succession interne claire ou lorsqu’elle nécessite un véritable renouveau stratégique.

  • Avantages du MBI:
    • Nouvelle Perspective : L’équipe du MBI apporte souvent un regard neuf et de nouvelles idées ou stratégies pour orienter l’entreprise.
    • Expertise : l’équipe du MBI devrait avoir une expérience significative et des compétences complémentaires à celles des managers en place. C’est d’ailleurs un des intérêts majeur d’un MBI, c’est-à-dire placer des managers reconnus et expérimentés pour prendre les rênes de la société.
  • Problématiques du MBI :
    • Intégration : L’intégration d’une nouvelle équipe de gestion peut rencontrer des résistances internes et des défis culturels. A ce titre, il peut y avoir plusieurs approches, et il est important que l’équipe du MBI sache moduler ses ardeurs et adapter son mode de management pour ne pas créer de « clash de culture d’entreprise ». De tels clash sont bien réels et sont la cause de la majorité des échecs dans un domaine tel que les fusions d’entreprise. Ici, il n’y a pas de fusion, mais un management trop agressif ne permettra pas l’épanouissement de la société. Le risque est une perte de confiance, de motivation, de productivité, de sens, ou une trop grande pression psychologique conduisant à la démission de membres importants du personnel, comme des chefs d’équipe reconnus et appréciés ou détenant un savoir-faire sans lequel l’entreprise est moins performante.
    • Connaissance de l’Entreprise : Contrairement au MBO, l’équipe du MBI peut manquer de familiarité avec l’entreprise et son secteur. Dans ce cas, le MBI part sur de mauvaise bases puisqu’il n’apporte ni le regard neuf ni  l’expérience requise de la part des nouveaux managers, alors que c’est justement ce qui fait tout l’intérêt des MBI.

c) Le BIMBO (Buy-In Management Buyout)

Un BIMBO est une forme de rachat d’entreprise où une équipe de direction externe (MBI) s’associe à la direction actuelle (MBO) pour acquérir l’entreprise.

Le BIMBO est donc un MBI+MBO. Il est souvent utilisé lorsque l’entreprise nécessite à la fois de nouvelles compétences et une vision neuve apportées par l’équipe externe, tout en misant sur la continuité de la gestion assurée par l’équipe actuelle.

Le BIMBO représente une stratégie d’acquisition innovante et intelligente, qui peut revitaliser une entreprise en combinant de nouvelles perspectives avec une équipe de gestion éprouvée et connue des employés de la cible. 

Toutefois, les défis liés à la gestion d’équipes mixtes, à la complexité du financement et à l’intégration post-acquisition, nécessitent une approche juridique et stratégique rigoureuse.

  • Processus d’un BIMBO :
    • Formation de l’Équipe : La première étape est de former une équipe combinée de managers internes et externes.
    • Évaluation et Financement : L’équipe doit évaluer la valeur de l’entreprise et structurer le financement, qui peut inclure des prêts, des capitaux propres et des financements par effet de levier.
    • Négociation et Acquisition : L’équipe négocie avec les propriétaires actuels et finalise l’achat de l’entreprise.
    • Transition et Gestion : Après l’acquisition, l’équipe combinée travaille ensemble pour diriger et développer l’entreprise.
  • Avantages du BIMBO :
    • Combinaison de Compétences : Le BIMBO tire parti des compétences et de l’expérience des managers internes et externes.
    • Flexibilité : Cette approche offre une plus grande flexibilité dans la structuration de l’équipe de direction et dans la stratégie d’entreprise.
  • Problématiques du BIMBO :
    • Complexité de Gestion : La fusion des équipes internes et externes peut entraîner des défis en termes de leadership et de culture d’entreprise.
    • Financement et Évaluation : Le financement d’un BIMBO peut être complexe, nécessitant une évaluation précise et une structuration financière soignée.

4. Le rôle des avocats

Les cabinets d’avocats jouent un rôle central dans les opérations de capital transmission. Leur expertise juridique doit être considérée comme un bouclier protecteur permettant d’équilibrer les intérêts en présence par la négociation comme par la rédaction de contrats et clauses spécifiques. Il est fortement déconseillé d’utiliser des modèles prétendument « prêt à l’emploi » qui n’ont pas été taillés pour la situation spécifique de chaque LBO. 

  • Due Diligence : Cette étape consiste en une analyse juridique approfondie de l’entreprise cible, au travers par exemple de ses comptes et de ses contrats. Aujourd’hui, pour les entreprises concernées, on pourrait y ajouter les obligations relatives à la directive CSRD si elles existent.
  • Les due diligences font intervenir plusieurs professionnels (expert-comptable, avocat, auditeur bilan carbone…) . 
  • Pour l’avocat, l’objectif est d’identifier tous les risques légaux potentiels qui pourraient affecter la transaction. Cela inclut l’examen des contrats, des litiges en cours ou potentiels, des questions de propriété intellectuelle, et de toute autre question juridique pouvant influencer la décision d’investissement. 
  • L’avocat met également en place, le cas échéant, les stratégies judiciaires permettant de prévenir un risque ou de dénouer une situation bloquante.
  • Structuration de l’Opération : Les cabinets d’avocats conseillent sur la meilleure façon de structurer juridiquement l’acquisition et le financement de l’opération. Cela peut impliquer la création de nouvelles entités juridiques, la rédaction d’accords et partenariats, ou la mise en place de structures contractuelles complexes pour optimiser les avantages fiscaux et légaux.
  • Négociation et Rédaction des Contrats : Les avocats assistent dans la négociation et la rédaction des accords de vente, des contrats de prêt, et des garanties. Ils s’assurent que les termes du contrat sont clairs, équitables et conformes aux lois applicables. Ils jouent un rôle crucial dans la minimisation des risques et la protection des intérêts de leur client.
  • Conformité Réglementaire : Ils veillent à ce que toutes les opérations soient conformes aux réglementations locales et internationales. Cela peut inclure des questions de concurrence, de réglementation financière, de protection des données, et d’autres domaines réglementaires pertinents.
  • Conseils Stratégiques : Au-delà des aspects purement juridiques, les cabinets d’avocats fournissent également des conseils stratégiques. Cela peut inclure la gestion des défis d’intégration post-acquisition et la conformité réglementaire continue, assurant ainsi une transition en douceur et une opération réussie.
  • Gestion des Défis de Transition : Les cabinets d’avocats conseillent également sur la gestion des défis liés à la fusion des équipes de direction et à l’intégration de l’entreprise. Cela peut impliquer des conseils sur la culture d’entreprise, la gestion des ressources humaines, et d’autres aspects clés pour assurer une fusion réussie et harmonieuse des entités.

Conclusion

Le capital transmission joue un rôle central dans le paysage financier moderne en permettant la restructuration, le développement et la transmission de valeur des entreprises à travers diverses méthodes telles que les LBO, LBI, MBO, MBI ou BIMBO.

Ces techniques partagent un objectif commun : optimiser la performance d’une entreprise pour la revendre à un prix plus élevé, générant ainsi un retour sur investissement significatif.

Le succès de ces opérations repose sur une combinaison de facteurs clés :

  • Une sélection rigoureuse de la cible,
  • Un financement judicieusement structuré,
  • Une gestion efficace post-acquisition,
  • Une stratégie de sortie bien planifiée.

Les défis ne manquent pas en termes de financement, de gestion des conflits d’intérêts et d’intégration des nouvelles équipes de direction.

Pour mettre en œuvre une telle opération, il faudra posséder une compréhension approfondie des mécanismes financiers, juridiques et fiscaux permettant de mettre au point une stratégie sur-mesure et réaliste en fonction des particularités et des objectifs de chaque opération.

L’intervention d’un cabinet comme Fieloux Avocats assure non seulement la légalité et la viabilité des transactions, mais aussi leur efficacité stratégique.

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